N’est pas linguiste qui veut

Du 15 au 17 septembre 2022 j’ai assisté  à Montréal à un congrès de linguistique du français. Le thème était la célébration du 50e anniversaire du premier grand corpus du français parlé montréalais qu’on appelle souvent le corpus Sankoff-Cédergren. Rappelons-nous que les linguistes appellent corpus un ensemble très structuré selon certains critères d’échantillons enregistrés de la langue parlée.

J’ai adoré ce congrès. Le premier corpus de Montréal a fait des petits partout au Québec et en Europe. Si bien que nous avons maintenant de solides bases de données sur la langue réellement parlée.

Les communications ont porté surtout sur l’évolution de la grammaire et de la phonétique. Et les choses bougent beaucoup.

Mais pour revenir au thème de ce blogue, ce qui m’a frappé c’est que les linguistes patentés, les vrais, ceux et celles qui enseignent et font de la recherche dans nos universités ne s’intéressent pas du tout à ces vieux débats oiseux sur les anglicismes, solécismes, barbarismes et autres impropriétés qui préoccupent tant les grammairiens et puristes grincheux.

Je n’ai pas entendu la moindre observation sur la prétendue dégradation du français. Rien sur les dits piètres résultats des élèves québécois aux examens de français. Rien sur la correction de la langue. Rien sur l’Office québécois de la langue française qui, curieusement, n’était pas présent. Que des observations et réflexions scientifiques sur le français et son évolution.

Par exemple, il y avait une présentation fort intéressante sur l’influence du français québécois sur  la langue des jeunes immigrés français à Montréal.

Bref, une bouffée d’air frais pour alimenter des débats fort intéressants sur l’évolution actuelle de la langue.

Cela m’amène à dire qu’il y a au Québec par ailleurs toute une faune grouillante de grammairiens et puristes qui se targuent de linguistes alors qu’ils n’ont ni le diplôme ni la pratique professionnelle. Un traducteur, un réviseur, un enseignant de français, un journaliste n sont pas des linguistes. Ils peuvent s’intéresser à la langue et en avoir leur opinion mais ils ne font pas pour autant de la linguistique. On ne leur connaît pas des travaux dans les revues scientifiques. On ne les voit pas dans des congrès de linguistique. Ils ne font pas de recherche. On les voit surtout dans le journal Le devoir où ils débitent leurs sempiternelles lamentations sur l’état de la langue.

Bref, n’est pas linguiste qui veut.

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